Soumission Chimique – Lettre INOVIE Septembre 2024

UN NOUVEL OUTIL INOVIE POUR LUTTER CONTRE LA SOUMISSION CHIMIQUE

C’est à Marseille, au sein du plateau technique d’Inovie Labosud Provence, que les médecins et pharmaciens biologistes experts en pharmacotoxicologie, ont mis en place un nouveau panel d’analyses utile à l’ensemble des laboratoires Inovie – et en premier lieu aux victimes – dont le caractère opérationnel représente un atout indéniable dans la lutte contre la soumission chimique. Le point avec le Dr Jenny BECAM.

🎤   Jenny Becam, en tant que médecin biologiste spécialiste de la pharmacotoxicologie, vous avez œuvré activement, avec les équipes d’Inovie Labosud Provence, au déploiement d’une nouvelle activité de toxicologie. Pourquoi ?

La soumission et la vulnérabilité chimique sont de vrais fléaux contre lesquels il faut lutter par tous les moyens. Pour avoir travaillé plusieurs années en structure hospitalière à Marseille, j’ai hélas pu constater une forme de « double peine » pour les victimes : non seulement elles constatent des symptômes (amnésie, fatigue importante, troubles de comportement…) qui les plongent dans une situation d’anxiété ; mais par-delà, certaines lenteurs administratives et la confusion qui règne alors dans leur esprit les prive souvent d’un élément essentiel pour éclairer l’origine de leur état : des résultats d’analyses fiables. Sauf que, je le rappelle, la condition pour pouvoir documenter biologiquement une suspicion de soumission chimique est de réaliser des prélèvements biologiques le plus rapidement possible et notamment dans un délai de 48h maximum pour l’urine…

🎤   Chaque heure compte.

Exactement. C’est d’ailleurs à partir de ce constat que nous avons élaboré ce tout nouveau protocole en deux temps, selon un process standardisé et calqué sur les pratiques des services hospitaliers spécialisés.

On commence par un premier dépistage rapide en immuno-analyse. 28 molécules/familles sont alors ciblées dont le GHB, pour un résultat préliminaire sous 24h à 48h.

Un deuxième dosage en spectrométrie de masse (LCMSMS, méthode de référence) est aussi opéré, mais la précision de ses conclusions requiert un délai supplémentaire de 3 ou 4 jours. A sa suite, on effectue une mise à jour du dossier patient.

🎤   Qui est concerné ?

Potentiellement tout le monde. La soumission chimique (SC) correspond à l’administration d’une ou plusieurs substances psychoactives à l’insu des victimes ou sous la menace, à des fins criminelles ou délictuelles (violences, vols…). S’il existe bien sûr des gestes préventifs, personne n’est à l’abri. Le contexte « classique » correspond toutefois souvent à un.e patient.e qui se présente au laboratoire au lendemain d’une soirée dont il ne conserve aucun souvenir…

🎤   La première urgence n’est-elle pas plutôt de déposer plainte au commissariat ?

Le dépôt de plainte peut tout à fait se réaliser après le prélèvement. Je rappelle que chaque minute qui passe, le corps élimine les substances psychoactives potentiellement incriminées. C’est une véritable course contre la montre qui s’engage !

Par ailleurs, les aspects judiciaires peuvent se régulariser a posteriori. Nos laboratoires sont, c’est important de le souligner, accrédités par le Comité français d’accréditation (COFRAC) selon la norme ISO 15189. Cela signifie qu’en cas de dépôt de plainte et judiciarisation de l’affaire, les résultats (confidentiels) des analyses que nous réalisons peuvent être saisis sur réquisition judiciaire et versés au dossier.

De plus le Dr Angéline Kernalleguen, ingénieure chimiste de l’équipe Inovie et experte près la cours d’Aix-en-Provence en toxicologie médico-légale, a participé au développement du projet en apportant son expertise pour la conformité du processus analytique. Notre protocole prévoit même un double échantillonnage lors du prélèvement, permettant de garder à disposition un tube intact dans les conditions conservations recommandées pendant 1 an, pour une éventuelle contre-expertise.

🎤   Pourquoi proposer ce nouveau type d’analyse ?

Parce que nous disposons d’un réel savoir-faire, de toute la réactivité et du maillage territorial nécessaire.

Certaines victimes n’ont pas le temps ou le choix de pouvoir se rendre aux urgences, où elles patienteront, en l’absence de signes visibles de violences, parfois plusieurs heures, laissant alors à leur organisme toute latitude pour éliminer les substances potentiellement incriminées…

🎤   Comment demander à faire le test ?

Il suffit de franchir la porte de nos laboratoires, partout où ils se trouvent. C’est pris en charge par la sécurité sociale et la mutuelle sur remise d’une ordonnance médicale stipulant explicitement “recherche de soumission chimique dans un contexte d’urgence”. Sinon, le coût est de 120€.

🎤   Ce projet vous a valu d’être entendue récemment à l’Assemblée nationale.

J’ai en effet fait partie des experts sollicités, dans le cadre d’un futur projet de loi, par la députée et la sénatrice en charge de la mission gouvernementale sur la soumission chimique.

Pour placer l’analyse que nous proposons au sein d’un parcours de soin optimal pour les patient.e.s nous avons mis en place un partenariat avec les Centre d’Évaluation et d’Information sur la Pharmacologie et l’Addictovigilance (CEIP-A). L’objectif est d’orienter des patients vers nos laboratoires et nos laboratoires remontent les résultats vers les CEIP-A. Suite à cette analyse, le patient, s’il le souhaite, pourra être contacté pour être entendu et recevoir des informations concernant ses droits, les services d’aide à disposition et le suivi médical possible.

Les résultats des analyses permettront un suivi épidémiologique des substances impliquées dans les cas de soumission chimique et une remontée d’information auprès des autorités compétentes pour légiférer et mettre en place des campagnes de prévention ad hoc.

Le Groupe Inovie et chaque biologiste du groupe est aujourd’hui mobilisé pour faire connaître ce nouveau service et proposer le panel en cas de soumission chimique suspectée chez l’un ou l’une de ses patients.